Le beau temps est enfin arrivé, le couvreur peut commencer à refaire nos 140 m² de toiture. Un gigantesque échafaudage est installé sur la face ouest de la maison, les premières tuiles sont retirées et descendues par un petit ascenseur et c'est comme par enchantement que la lumière du soleil peut pénétrer dans la chambre d'enfant à travers l'ossature construite par Lionel !
Le même jour, vers 17h30, je rentre à l'hôpital de Meaux pour être cerclée. Nous passons d'abord par les urgences pour vérifier la vitalité du bébé, c'est un peu long parce qu'il y a des dames qui ont l'air pressées d'accoucher, et des papas qui semblent tout perdus avec leurs sur-chaussures bleues et le sentiment de commencer à comprendre ce qui se trame...
Moi je suis toujours un peu angoissée à l'idée que notre bébé ait perdu sa vitalité, mais l'interne de garde qui nous reçoit enfin me rassure (Lionel, lui, n'était pas inquiet !), et ne tarit pas d'éloges à destination de mon homme ! Mais non il est pas homo ! Dans la foulée, une infirmière trouve très sympathique, voire utile, de me poser un cathéter dans une veine de l'avant-bras droit ; moi, je ne trouve pas ça sympathique du tout parce que je vais devoir passer la nuit à l'hôpital et que je trouve que c'est très désagréable de dormir avec une perfusion.
"Oui mais madame, comme ça je peux vous faire la prise de sang en même temps !" Je broie la main de Lionel un bon coup (pourtant je ne suis pas chochotte, je le jure), je donne mon sang, et me voilà équipée, prête pour l'intervention du lendemain matin.
Je rejoins ensuite ma chambre, dans l'aile toute neuve de la maternité ; la déco n'est pas très personnalisée, ni vraiment catalogue Habitat-Ikéa-Alinéa et encore moins Roche-Bobois ! Non, ils doivent avoir d'autres catalogues pour le hôpitaux, avec uniquement des lits simples à commande électrique et tout le mobilier possible et imaginable à roulettes ! Ici tu ne te poses pas la question de savoir si les meubles vont rentrer par la porte, tout est pensé, on te sort de ta chambre sans que tu aies à descendre de ton lit, c'est tout dire !!!
Je partage mon frugal plateau repas dinner party avec Lionel et le laisse repartir vers notre lit en 160, matelas Bultex et couette super confortable Ikéa.
Après, une infirmière vient m'expliquer le protocole de désinfection pré-opératoire ; elle me fait cadeau d'un gel douche rose grenade dont j'ai (volontairement) oublié le nom (mais je ne le recommanderai pas, ça fait plutôt décapant pour les sols avec mention "ne pas laisser à la portée des enfants"), et me demande de me laver une fois avant de me coucher et une fois au réveil, et de ne rien manger après minuit, je peux boire jusqu'à 4 heures. Je fais donc ma petite toilette, ça crisse sur le peau, et surtout sur les cheveux ; je ressors de la douche (à l'italienne s'il vous plaît !) (mais je doute que ce soit pour suivre la tendance) avec l'impression d'avoir subi un lifting tellement la peau me tire !
Il est 21h, je n'ai rien à faire, et en plus on vient m'annoncer que je passerai aussi la nuit suivante à l'hôpital ! N'importe quoi ! Je râle, expliquant (en frimant un peu) que pour mon dernier cerclage (à Paris, hé oui !) j'ai eu droit à une hospitalisation en ambulatoire, non mais !
Heureusement à 40 km de là, Vanessa n'a rien à faire non plus, et m'appelle, pendant 1h30, merci ma biche, c'était super !!!
Après je me sens toute triste toute seule et j'appelle mon homme qui s'était déjà réfugié dans les bras de quelqu'un d'autre ("M." préfère garder l'anonymat), mais il se réveille et me réconforte de tendres paroles ; quelques sanglots plus tard, ça va beaucoup mieux, nous raccrochons à regrets et je finis par m'endormir pour une petite nuit pas très sereine, comme quand on dort à l'hôpital quoi !
Pas de petit déjeuner international au réveil, comme prévu, dommage... je me demande si je n'ai pas pris de mauvaises habitudes quand j'étais PNC chez Air France... toujours la première au petit déj', pour pouvoir tout goûter en prenant mon temps...
Je m'égare, pardon. Donc je suis là, à jeun, à attendre le brancardier plein de muscles qui sent bon le parfum, et le voilà, super sympa, même pas besoin de sortir de mon lit et c'est parti pour une grosse balade dans les couloirs de l'hôpital de Meaux avec bolide de compétition et chauffeur personnel !
Pas de montée des marches ici mais des ascenseurs très spacieux, c'est très bien aussi ! A mon arrivée sur les lieux, le comité d'accueil est très souriant mais ne souhaite manifestement pas dévoiler son identité, je ne saurai donc pas si c'était des infirmières, des élèves infirmières ou des apprenties coiffeuses ! Peu importe, c'est bien organisé, efficace et rapide, en deux temps trois mouvements, je suis sur mon lit de bloc op', délicatement posée là telle une petite chose fragile.
Tout le monde ou presque est là, il manque encore l'anesthésiste, mais je peux déjà commencer à papoter avec l'infirmière anesthésiste, la chirurgienne (qui n'est autre que le Dr Michel) et l'interne qui va s'entraîner sur moi ! L'infirmière s'apprête à me poser une perfusion, mais je dis STOP j'en ai déjà une (ouf !) ! Elle m'installe le petit déj' par voie intraveineuse, plus une super couverture avec soufflerie chaude intégrée pour que j'ai bien chaud, parce qu'ici il fait frais, et peut-être aussi que je commence à avoir les chocottes de vivre un cerclage sous rachianesthésie... Je n'arrête pas de faire la maline, mais ce n'est pas mon hobby au départ de faire des grossesses pénibles ! En plus le bras du petit déj' vient de doubler de volume, ce qui n'affole pas trop l'infirmière, mais du coup, comme la perf' était mal posée, le liquide est en train de se diffuser dans mes muscles et mes tissus, mais pas dans les veines :-((
J'aide l'infirmière à poser une autre perfusion, et me voilà bien équipée cette fois-ci ! (merci l'infirmière de la veille au passage !) (je me retrouve avec un méga pansement alcoolisé sur tout l'avant-bras droit).
L'anesthésiste arrive enfin, en guest star, dans un ensemble bleu indigo signé HP, accessoirisé d'une petite cagoule assortie et masque vert céladon, comme les autres membres de l'équipe d'ailleurs, à croire qu'il n'y a qu'une manière de s'habiller pour aller bosser au bloc ; enfin, ça les regarde mais moi je trouve ça limite pas très laïque tout ça.
On fait les présentations, on se vanne gentiment, je frime un peu avec mon ipod 80 Gigas que je vais pouvoir me mettre dans les oreilles dès que la rachi sera posée pour laisser tout le monde travailler tranquillement. L'anesthésiste m'explique comment ça va se passer, je m'assois tête posée sur l'épaule de l'infirmière, et là je sens comme une très grosse aiguille rentrer dans mon dos, j'essaie de me décontracter en me disant que c'est pour la bonne cause. Le truc a l'air de fonctionner à peu près, les chirurgiens peuvent commencer à œuvrer...
On a l'embarras du choix : petit, moyen ou géant spéculum, pareil pour les pinces, tout est prévu pour un maximum de visibilité (pas pour la mienne, il y a un joli rideau bleu entre nous).
Finalement, je ne trouve pas ça poli du tout d'écouter mon ipod alors qu'il y a du monde qui s'occupe de moi, et nous voilà en train de papoter gaiment musique, cinéma, enfants (quand même), boulot, comme des vieux amis, puisque l'infirmière, l'anesthésiste et moi n'avons plus rien à faire ; les autres se démènent pour m'attraper suffisamment de col pour faire leur couture, le Dr Michel a l'air satisfaite du travail de l'interne, et l'infirmière peut déjà commencer à nettoyer les dizaines de centimètres carré de bétadine dont on m'a badigeonné l'entre-jambe !
Évidemment je ne vais pas sortir du bloc en trottinant puisque je ne peux absolument pas bouger les jambes, et c'est donc en salle de réveil (bizarre, moi je suis réveillée) où m'attend fidèlement mon lit avec mon oreiller chéri que je vais devoir passer les deux heures suivantes.
C'est très amusant de se retrouver en salle de réveil avec les idées bien claires, parce qu'on voit les autres se réveiller et raconter n'importe quoi, et le personnel de salle de réveil expliquer aux opérés que "c'est terminé là madame", que "vous êtes en salle de réveil monsieur !", "madame, réveillez-vous ! vous m'entendez ?", bref il y a ici une drôle d'ambiance, comme un matin de grosse cuite dans une grande maison où tout le monde serait resté jusqu'au bout de la nuit. Sauf que moi je n'aurais rien bu !
On vient de temps en temps vérifier mes "constantes" (j'ai entendu ça dans Urgences), j'en profite pour raconter ma vie à qui veut bien m'accorder un peu de temps, j'écoute un peu mon ipod (il a servi à quelque choses finalement) et lorsque j'en ai vraiment trop marre, je me lance dans une série de parties de réussites, toujours dans mon ipod, jusqu'à ce que la chance me sourit et qu'enfin toutes mes cartes aient rejoint studieusement chacune son tas de couleur.
L'anesthésiste vient aussi me voir régulièrement pour me pincer, me grattouiller, me chatouiller, jusqu'à ce que je puisse bouger les orteils et soulever mes genoux.
Un peu avant midi je peux enfin regagner ma chambre, toujours chaperonnée par le monsieur musclé qui sent bon (un peu moins maintenant) et qui papote avec ses collègues dans l'ascenseur, comme si je n'étais pas là (c'est plus ce que c'était le service de nos jours !).
Mon prince charmant transformé en rayon de soleil est là, fidèle au poste, prêt à prendre sa raclée au Scrabble (oui je sais, ça coupe cours à tout suspens, mais il vaut mieux se débarrasser des nouvelles pénibles, comme ça on n'en parle plus, ça évite de tourner autour du pot, parce que ça la fiche mal de se faire battre au Scrabble par quelqu'un qui sort de salle d'opération, même sous rachianesthésie !).
Je retrouve mes jambes vers 15h30, je vais bien, tout le personnel a l'air content, et moi aussi car ils ont besoin de chambres, et ils vont donc me laisser sortir le soir-même, non mais !
Je retrouve ma maison avec ses portes pas très larges, mon lit en 160, ma couette super chaude, et surtout des nuits toutes douces avec mon Lionel !
Contrairement à mon précédent cerclage, on ne me demande pas de rester allongée tout le temps, mais de me reposer (ce terme est flou, je vous l'accorde) ; terminé l'école pour moi, nous sommes le 17 février, plus que 6 mois !
Ce n'est qu'en attendant mon quatrième enfant que j'apprends que je ne suis pas obligée de faire la queue pendant 45 minutes pour entrer au Palais de la Découverte, j'essaierai de m'en souvenir pour le cinquième !
Février se termine sur une année de plus pour Sacha qui fête ses six ans, et qui porte désormais des lunettes à cause d'un oeil paresseux !
La toiture est presque terminée, les travaux des combles peuvent continuer !
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